Article écrit avec Joseph Félix - expert Speedernet en ingénierie pédagogique
On suppose souvent qu’un besoin de formation provient d’un manque de savoir. Comme s’il suffisait que les apprenants connaissent certaines choses pour automatiquement les appliquer.
Bien sûr, les choses ne sont pas aussi simples. Mais pourtant beaucoup de formations sont encore conçues selon ce principe.
Prenons une entreprise qui vient de créer une nouvelle politique santé et sécurité avec une liste de règles d’or en la matière. Quel type de formation conviendrait le mieux pour que les règles soient appliquées durablement ?
Je vous propose d’imaginer quatre niveaux de réponse allant de la plus “rudimentaire” à la plus complète. Nous verrons en parallèle leur impact sur l’efficacité probable de la démarche.
Niveau 0 : pas de formation du tout
Quoi de mieux pour apporter l’information aux apprenants que de la leur envoyer directement par mail ? Et pour être sûr qu’ils ouvrent le mail, on peut écrire « TRÈS IMPORTANT » dans le sujet pour qu’ils ne le ratent pas… non ?
Ce qu’on peut en attendre
Ce message “très important” va probablement se perdre dans un flot de mails. Eh oui, malheureusement, on a tous fait cette expérience. Ce “très important” place immédiatement votre mail dans la catégorie “obligatoire et pénible” pour vos collaborateurs et file donc immédiatement dans la pile des “à voir plus tard”.
Le simple envoi d’informations aux apprenants dans l’espoir qu’ils les appliquent est un vœu pieux. Comment s’assurera-t-on qu’ils auront lu et compris les informations envoyées ? Comment espérer qu’ils prennent le temps et le “risque” de répondre pour poser leurs questions ou demander des détails ? Cet aveu d’incompréhension peut s’avérer très coûteux socialement et psychologiquement pour eux.
C’est donc là que la formation, et particulièrement la formation en ligne avec ses capacités de suivi et d’évaluation, peut s’avérer utile.
Niveau 1 : présentation des informations
Pour s’assurer que les apprenants sauront tout ce qu’ils doivent savoir autour de la politique santé et sécurité, on peut avoir recours au “bon vieux” module e-learning (ne soyez pas vexé et sachez plutôt qu’on peut aller beaucoup plus loin de nos jours… vous le verrez dans la suite de l’article).
On peut répartir les contenus de la politique en une série de slides pour que les apprenants les intègrent progressivement. Puis, pour amener le côté multimédia, on peut animer chaque phrase progressivement avec une voix-off.
Ensuite, on peut afficher la liste des règles d’or et placer des appels à l’action (call-to-action) sur chacune d’elles pour impliquer les apprenants dans leur découverte. Une voix-off décrivant chaque règle tandis qu’une photo et des mots-clés s’affichent à l’écran.
Enfin, on peut mettre une série de questions pour interroger les apprenants sur tout ce qu’ils viennent de lire et d’entendre. Via la plateforme LMS on peut visualiser le nombre de slides vues pour s’assurer qu’ils l’ont suivi de A à Z, ainsi que leur score de quiz pour être sûr qu’ils ont tout compris.
Ce qu’on peut en attendre
Cette approche est certes meilleure que d’envoyer les informations directement aux apprenants :
- On segmente les contenus pour permettre leur assimilation progressive,
- L’association de sons, images et textes de façon complémentaire optimise l’usage des deux canaux entrants, visuel et sonore,
- On s’assure aussi de la complétion du module par une remontée de suivi dans le LMS et de la compréhension des contenus via le quiz de fin.
Cela dit, on reste encore sur la supposition qu’il suffit d’exposer les apprenants aux informations et de les laisser choisir ce qu’ils veulent en faire tout seuls.
Et justement, sauront-ils quoi faire de toutes les informations qu’on leur présente ? Ils ont beau connaître les règles, sauront-ils les appliquer le moment venu ?
Et si on allait plus loin en leur montrant comment appliquer ces informations ?
Niveau 2 : mise en situation
On peut garder le format e-learning, tout en y apportant plus de créativité.
On peut créer une série d’activités où on présente des situations à risque et demander aux apprenants de choisir parmi une série de décisions à prendre ou de comportements à adopter.
Au lieu de leur indiquer s’ils ont donné la réponse juste ou fausse, on peut leur montrer les conséquences de leurs décisions avant de les informer de la meilleure action possible et de la règle d’or associée.
Le quiz final reprend ce même principe en proposant d’autres situations à risque pour chaque règle d’or, afin de vérifier la capacité des apprenants à appliquer ces bonnes pratiques dans des contextes différents.
Ce qu’on peut en attendre
Le gros avantage de cette approche, c’est d’associer les informations aux conséquences réelles de leur application. En leur faisant prendre des décisions et voir les conséquences, on donne aux apprenants l’occasion d’assumer leurs choix de façon sécurisée.
Ainsi leur santé comme celle de leurs collaborateurs ne sera évidemment pas mise en danger en cas de décision erronée.
Par ailleurs, dans ce type de modalités, on peut exploiter tout le potentiel des différents formats multimédia selon les moyens dont on dispose : photos, illustrations, VR, mais aussi dessins animés, jeux d’acteurs filmés etc.
Comme dans ces exemples :
Cela dit, il nous reste une étape pour toucher au sublime dans le projet de formation…
Niveau 3 : actions de suivi
Après la formation (cf. niveau 2), on peut mettre en place un certain nombre d’actions de suivi :
- On peut créer des groupes de travail par environnement (bureau, entrepôt, labo, etc.) afin de réfléchir à des manières précises d’appliquer les règles dans le lieu de travail concerné (car les risques ne sont pas les mêmes au service comptabilité que sur une chaîne de production),
- Il est également possible de faire identifier aux apprenants les risques potentiels sur leur lieu de travail et adapter certaines zones en conséquence (affichage de consignes, modification des rangements…). On casse ainsi le côté “top/down” et on initie une démarche participative qui va bien évidemment fortement améliorer la rétention des règles d’or,
- On peut enfin améliorer certaines procédures afin de faciliter l’adoption de pratiques plus favorables à la santé et à la sécurité de tous en profitant des remontées terrain.
Ce qu’on peut en attendre
Le suivi post-formation est tout aussi essentiel que la formation elle-même pour apprécier son vrai impact et s’assurer de la véritable application des savoirs, savoir-faire et savoir-être acquis. Leur mise en place doit être assurée par le management au sein des équipes.
Ces actions collectives et adaptées à chaque division de l’entreprise permettent de maintenir les effets de la formation et son efficacité dans le temps.
Ce qu’il faut retenir
- L’apport seul d’informations aux apprenants ne garantit pas leur assimilation. Une formation accompagnée d’un suivi de la complétion et d’une évaluation permet de vérifier que tous ont bien compris les informations délivrées,
- L’usage judicieux de supports multimédias permet d’optimiser le processus d’apprentissage au-delà de la simple lecture des informations. Ils ne sont plus simplement lecteurs, ils sont spectateurs, auditeurs etc.
- Les activités de mise en pratique sont un moyen de guider les apprenants dans l’application réelle des notions grâce à un entraînement adapté et d’avoir un feedback immédiat vis-à-vis de leurs choix,
- Les actions de suivi permettent enfin d’assrer l’efficacité à moyen et long terme de la formation dispensée. C’est un facteur de ROI.
J’espère que ce premier article dédié à l’ingénierie pédagogique vous sera utile. N’hésitez pas à partager vos commentaires, bonnes pratiques et réactions sur ce sujet juste en-dessous, je me ferai un plaisir d’y échanger avec vous.
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A très bientôt !
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Merci mais il me semble que vous n’avez pas évoqué un aspect pédagogique d’une formation efficace ..c’est la reconnaissance !
créer des niveaux de formation avec des paliers à atteindre qui permettent d’accéder à des « privilèges » ( concours nationaux, rencontre avec développeurs, beta testeurs … ).. cela créé une autre motivation à suivre une formation (parce que l’on est joueur ou qu’on veut le valoriser sur un CV .. )
Merci Guillaume pour ce retour très pertinent ! Vous avez raison, c’est une dimension très intéressante à aborder. Certains profils aiment cette sensation de progression et de récompenses exclusives obtenues par l’effort. Avez-vous des exemples d’applications de cette reconnaissance qui vous paraissent particulièrement évocateurs ? Nous serions ravis de les découvrir grâce à vous.
Merci !